Une république bananière est un pays peu développé, dont l’économie repose typiquement sur la seule production de bananes, et dirigé par une ploutocratie autoritaire mise en place, aidée ou soutenue par des grandes multinationales de l’agroalimentaire, la principale étant l’United Fruit Company.
Origine de l’expression république bananière
L’écrivain américain O. Henry (William Sydney Porter) fut le premier à utiliser l’expression en 1904 pour désigner un régime dictatorial et corrompu. Il évoquait sans le nommer le Honduras, petit pays d’Amérique latine, producteur de bananes, qu’il qualifia de « petite république bananière maritime ».
À l’origine l’expression servait à parler de la relation que les États-Unis entretenaient avec les pays d’Amérique centrale et d’Amérique du Sud, à partir des années 60, on l’utilise pour comparer la France aux pays africains, souvent des ex-colonies françaises. L’expression s’applique aussi à des pays qui ont l’apparence d’une république, mais qui sont corrompus.
Qu’en est-il de la United Fruit Company ?
Nous sommes au XIXe siècle, la United Fruit Company, ancêtre de la fameuse Chiquita Brands International, a pris d’assaut l’Amérique latine pour y planter des bananes. En 1899, la société détenait en Amérique latine et aux Caraïbes le quasi-monopole de l’exploitation des bananes.
L’entreprise contrôlait le logement des travailleurs, les transports, parfois la distribution d’eau et d’électricité ; il manigançait des coups d’État, réprimait les manifestations et bloquait toute réforme en faveur des paysans. Parmi ces pays, nous pouvons citer, le Panama, le Cuba, la Colombie, le Honduras et le Costa Rica.
En 1928, les plantations se mettent en grève en Colombie. Le pays est paralysé, mais la population soutient. La tactique de l’UFC va alors consister à affamer la population vu qu’elle contrôle les sources d’approvisionnement en nourriture et les commerces.
Et là, on sort l’ultime joker : la grève serait en fait un coup des communistes. Les États-Unis auraient donc menacé l’armée d’envahir la Colombie et de reprendre le pouvoir. Un Général de l’armée colombienne va décider d’agir fort pour en finir vite face à ce danger.
Le massacre des bananeraies (Masacre de las bananeras) ou le massacre de Ciénaga
Nous sommes le 6 décembre 1928, ce jour-là, 4 000 grévistes de l’UFC occupent la gare de Ciénaga. Le Général arrive avec un contingent de 1 500 soldats, encercle la gare et ordonne d’ouvrir le feu sur les manifestants.
Le nombre de victimes fit l’objet de controverses. Selon le rapport de l’ambassadeur des États-Unis en Colombie adressé au Département d’État, il s’établirait jusqu’à plus de 1 000. Le massacre des bananeraies inspirera l’écrivain Gabriel García Márquez pour un des épisodes de son chef-d’œuvre Cent ans de solitude.
Une fois la grève terminée, l’UFC s’était permis le luxe de baisser radicalement le salaire des ouvriers, a limité la liberté syndicale et interdit les revendications salariales en Colombie. Pendant 50 ans, la situation profitera aux dictateurs, bénéficiant du soutien de cette puissante entreprise et les coups d’État continueront en Amérique latine, faisant des centaines de milliers de victimes, toujours sous fond de guerre pour la banane.
Il faut attendre les années 1940, pour que l’entreprise ne commence par attirer les foudres des populations. À Cuba, Fidel Castro a récupéré et redistribué les plantations de la firme.
L’on se pose la question de savoir comment des sociétés qui vendent des fruits en sont arrivées à pouvoir contrôler des pays entiers ? Encore aujourd’hui, ces sociétés à réputation sulfureuse existent juste qu’ils ont changé de nom dans les années 90, mais l’expression « république bananière » est quant à elle passée à la postérité.